Les Alternatives Catholiques

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Les Altercathos à Rome (3) “Nous n’avons pas besoin de politiciens catholiques”

Du 21 au 24 juin 2015, les Alternatives Catholiques étaient à Rome avec un groupe présidé par Monseigneur Rey, dans l’objectif de découvrir les Dicastères romains, de rencontrer des cardinaux et d’adopter un autre regard sur le monde, vu depuis Rome. Organisé par l’Observatoire Socio-Politique du Diocèse de Fréjus-Toulon, le voyage réunit des élus locaux, députés, jeunes engagés en politique, journalistes et ecclésiastiques. Lors de la deuxième journée d’audiences, nous avons rencontré le Cardinal Sarah, en charge du dicastère du culte divin et la discipline des sacrements – l’une des rencontres les plus marquantes du séjour pour les participants. Le Cardinal Sarah a pu nous rappeler la mission qui lui a été donnée par le Pape François : faire appliquer le concile Vatican II en terme de liturgie, en revenant aux textes. Ce fut également pour lui l’occasion de partager sa vision de la liturgie, ou plutôt de rappeler ce que l’Eglise en dit.

« Les sacrements et la liturgie sont des lieux de rencontre avec Dieu pour l’homme, nous dit le Cardinal Sarah. Qui dit liturgie, dit adoration, dit Dieu. » Or, la liturgie, depuis Vatican II, s’est détériorée. La messe est devenue une fête où l’on chante, où l’on danse, où on se prend en photo, où on applaudit. Mais ce n’est pas cela la messe ! La messe, c’est le mystère de l’eucharistie. « La liturgie, c’est entrer dans le sacrifice de Jésus, c’est participer à sa mort. » La messe n’est pas là pour procurer un bien-être spirituel aux croyants. Le prêtre n’est pas un animateur. Au contraire, il y a une grande nécessité de redécouvrir le silence dans la liturgie, car la liturgie doit être au service de cette rencontre authentique avec Dieu. Bien sûr, il ne s’agit pas de supprimer les traditions locales et les expressions de joie au cours de la messe, mais il faut bien se rendre compte que la liturgie ne se résume pas à cela, et qu’il est essentiel de laisser place au silence, de laisser place à Dieu, en fait.

Le drame de notre société contemporaine, c’est que Dieu a disparu, Dieu a été exclu. Non seulement, il a disparu de notre vie quotidienne et de nos actions, mais il a aussi disparu dans certaines façons de pratiquer la liturgie. Si nous, catholiques, n’arrivons pas à susciter de conversion, c’est parce que nous ne parlons pas assez de Jésus. Si nos enfants et nos contemporains ont déserté l’Eglise, c’est parce que nous n’avons pas su les aider à rencontrer Dieu, notamment au sein de la liturgie.

En effet, plutôt que d’annoncer le Christ, nous avons transformé notre foi en combat politique, nous nous focalisons sur des thèmes comme la pauvreté ou la famille, mais nous ne parlons plus de Jésus. Bien sûr qu’il faut s’engager auprès des pauvres et défendre la famille, la vie et la création que Dieu nous a données, mais il faut avant tout annoncer le Christ ! Notre préoccupation constante doit donc être celle de susciter une vraie rencontre avec le Christ et de remettre Dieu au centre.

Remettre Dieu au centre de sa vie et de ses engagements, c’est ce qu’essaie de vivre Gigi de Palo, conseiller municipal de la ville de Rome, que nous avons rencontré plus tard dans la journée. Gigi, déjà engagé dans des associations catholiques pour les ouvriers puis pour les familles, est entré en politique un peu par hasard. Il n’en avait pas vraiment envie, mais c’est dans la prière qu’il a trouvé le courage de dire « oui » à l’appel du maire de Rome. Il nous dit que lors de chaque décision importante, chaque temps fort, il se réveille au cœur de la nuit pour faire une « scrutatio », c’est-à-dire lire les écritures et entrer dans un dialogue avec elles pour discerner sa décision, dialogue dont il rend compte dans une lettre adressée à sa femme et qu’il lui remet le lendemain matin, au petit déjeuner. La prière et l’alliance avec sa femme sont pour lui fondamentales dans son engagement politique : c’est avec elle et dans la prière qu’il choisit chaque jour de poursuivre cet engagement.

Même s’il nous dit que la politique, c’est compliqué et difficile, il a choisi de ne pas se résigner, comme l’avait annoncé Jean-Paul II lors de son homélie des JMJ de Rome en 2000 : « vous ne vous résignerez pas ! ». C’est d’ailleurs le slogan du mouvement qu’il a cofondé, OL3 : « ni indigné, ni résigné ».

Ces deux rencontres, avec le Cardinal Sarah et Gigi de Palo, ont sans doute été les plus marquantes de notre séjour à Rome avec l’Observatoire Socio-Politique de Fréjus-Toulon. Nous avons été touchés par la douceur et les paroles de vérité du Cardinal, et par le beau témoignage de Gigi. Nous avons pu comprendre que s’il est beau et nécessaire de s’engager en politique, cela ne peut se faire que si notre engagement est véritablement enraciné dans le Christ et que si chacune de nos actions est au service d’une rencontre avec Lui. Et Gigi de terminer en ces mots : « Nous n’avons pas besoin de politiciens catholiques, mais de catholiques en politique. Un substantif, ça n’est pas la même chose qu’un adjectif. »

Myriam
Agrégée d'anglais et doctorante. Vice-présidente des Altercathos, responsable du programme culturel.

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